Au Canada, les politiques tardent à suivre les progrès en matière de maladies neuromusculaires, mettant gravement à risque les personnes atteintes et leurs proches aidants

Au cours des dernières années, les Canadiennes et les Canadiens atteints d’une maladie neuromusculaire ont observé une évolution remarquable de leur parcours de vie. Les progrès réalisés dans les traitements modificateurs de la maladie et l’amélioration des normes de soins, ainsi que l’expertise partagée par les personnes ayant une expérience vécue, ont offert la perspective d’une vie plus longue et plus épanouie à des personnes dont le diagnostic avait autrefois des conséquences tragiques. Des maladies comme l’amyotrophie spinale (AS) et la dystrophie musculaire de Duchenne, dont le pronostic était autrefois sombre, sont aujourd’hui considérées comme des conditions gérables, les personnes atteintes pouvant atteindre l’âge adulte, poursuivre une carrière, contribuer et participer à la société. Mais si la science et les personnes vivant cette expérience ont vu des progrès considérables, les politiques et les systèmes de soutien n’ont pas suivi le rythme.

Une étude récente portant sur le fardeau que représentent les maladies neuromusculaires héréditaires met en évidence l’écart entre les progrès de la médecine et les politiques censées soutenir les personnes atteintes d’une maladie neuromusculaire au Canada. De trop nombreux citoyens canadiens atteints d’une maladie neuromusculaire doivent faire face à des dépenses considérables pour couvrir les frais liés à des équipements médicaux essentiels, des aides techniques, des soins à domicile, un logement accessible et les services nécessaires pour vivre de façon autonome et assurer la sécurité de leurs proches aidants. Le rêve d’une vie autonome, ainsi que le droit de choisir son lieu de résidence et son mode de vie sont donc hors de portée.

Prenons l’exemple de Crystal Rondeau, une femme de 35 ans vivant à Winnipeg et atteinte d’AS de type 2. Malgré la résilience exceptionnelle dont elle, sa famille et ses amis font preuve, ainsi que ses actions continues pour la défense de ses droits et ceux des autres, Crystal est contrainte de vivre à l’hôpital en raison d’un manque de soins à domicile appropriés. Crystal et tant d’autres nous ont appris que leurs besoins sont complexes et nécessitent un soutien personnalisé. Souvent, ces besoins ne peuvent être satisfaits à long terme dans un établissement ou en milieu médical. La situation de Crystal n’est pas isolée. Partout au pays, des personnes atteintes d’une maladie neuromusculaire sont contraintes d’être hospitalisées ou placées en établissement, non pas par nécessité médicale, mais plutôt en raison des lacunes dans le soutien gouvernemental et d’un financement inadéquat de soins à domicile essentiels.

Pour les personnes atteintes d’une maladie neuromusculaire, la situation ne se résume pas à des difficultés financières. C’est aussi une question de dignité et de capacité à choisir son milieu de vie. Les gouvernements des niveaux fédéral et provincial doivent reconnaître que fournir les soutiens adéquats n’est pas seulement une obligation morale, c’est une nécessité économique. Lorsque des personnes comme Crystal se voient imposer un séjour prolongé à l’hôpital, le système de santé est mis à rude épreuve, ce qui coûte souvent plus cher que de financer des soins de proximité et de fournir les soutiens à domicile requis.

La solution est claire : les gouvernements doivent combler les lacunes systémiques en matière de financement qui obligent les personnes atteintes d’une maladie neuromusculaire à se retrouver dans des établissements ou occuper des lits d’hôpitaux. Nous devons adopter une approche globale et universelle en matière de financement et de soutien qui permette aux Canadiennes et aux Canadiens atteints d’une maladie neuromusculaire de choisir leur cadre et leur lieu de vie, de participer pleinement à la communauté et d’assurer la sécurité de leurs proches aidants.

Les progrès de la médecine se sont multipliés, mais les politiques n’ont pas suivi. Il est temps que les décideurs agissent et veillent à ce que les Canadiennes et les Canadiens atteints d’une maladie neuromusculaire puissent vivre avec la dignité, l’autonomie et le soutien auxquels ils ont droit. Crystal et sa famille ont un plan précis pour son retour à la maison, mais ils ont un besoin urgent de soutien financier pour ses soins personnels. Il ne s’agit pas de remplacer le soutien familial, loin de là. La mère de Crystal a toujours été, et continuera d’être, une proche aidante dévouée. Cependant, comme tout proche aidant, elle a besoin de temps pour se reposer et récupérer.

Malgré de nombreuses demandes d’aide gouvernementale et des actions soutenues de défense des droits, Crystal reste confinée dans un lit d’hôpital et rien n’indique que les ressources nécessaires lui seront fournies pour qu’elle puisse rentrer chez elle. Cette situation est inacceptable. Le manque de financement pour les soins à domicile contraint des personnes comme Crystal à séjourner dans des établissements, les privant ainsi de leur autonomie et imposant des contraintes inutiles aux familles. Nos gouvernements doivent agir maintenant pour éliminer ces barrières et soutenir le droit de Crystal à vivre chez elle, avec les soins dont elle a besoin.

Chaque jour, Crystal et d’autres personnes nous rappellent que vivre avec une maladie neuromusculaire peut provoquer une sensation de perte de contrôle constante à mesure que la maladie évolue. La science a contribué à ralentir la progression de certaines maladies neuromusculaires. Il est temps maintenant que nos gouvernements veillent à ce que Crystal et les autres Canadiennes et Canadiens disposent d’options, et à ce que leurs proches aidants soient en sécurité et en bonne santé. Et, oui, à ce qu’ils puissent être en contrôle de leur vie.

Dystrophie musculaire Canada continue de travailler aux côtés de Crystal et de sa famille pour défendre ses droits. Alors que des percées médicales se profilent à l’horizon, il est maintenant temps de faire évoluer les politiques afin que tous les Canadiens et les Canadiennes touchés par les maladies neuromusculaires puissent s’épanouir.

Stacey Lintern
Chef de la direction, Dystrophie musculaire Canada

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